mardi 6 janvier 2015

Le royaume Khmer

Un peu d'histoire

Nous voici donc au Cambodge, ce pays de 15 millions d'habitants borde par la Thailande, le Laos et le Vietnam se remet doucement de plusieurs decennies d'horreur qu'il est interessant d'evoquer ici tres rapidement: colonie francaise jusqu'en 1953, puis une quinzaine d'annees de paix avec un roi qui commet l'erreur de refuser de faire alliance avec les Etats Unis durant la guerre du Viet Nam. S'enchainent alors les habituelles strategies de la CIA: destabilisation du regime, lourd bombardement de civils (1) pour eliminer les terroristes Vietnamiens, coup d'etat puis installation du regime sanguinaire des Khmers rouges (1975-79). 3 ans et 1 million de morts plus tard, le Vietnam envahit le pays et chasse ces derniers qui entrent en guerilla. Finances par les Etats Unis, entraines par la Grande Bretagne, durant les annees 80 les Khmers truffent le pays de mines antipersonnel, imites par leurs ennemis Vietnamiens, qui continuent aujourd'hui de tuer ou mutiler les agriculteurs et leurs enfants en explosant au hasard des chemins. Pol Pot meurt en 1998, en 2003 le parti communiste Cambodgien gagne les elections et controle depuis le pays qui decroche actuellement la 164eme place sur 184 en terme de corruption. Pauvre Cambodge dont le seul tord a ete durant toutes ces annees d'etre situe au mauvais endroit. Apres de telles evocations, les larges sourires qui nous accueillent paraissent miraculeux.

Vues de la route

Rien ne transparait au premier abord de ces annees d'enfer qui ont meurtri le pays. La route se perd a l'infini dans une desesperante rectitude au milieu d'immenses rizieres parsemees d'arbres solitaires entre lesquels paissent paisiblement buffles d'eau et vaches a  (tres) grandes oreilles. La chaleur est intense a partir de 10h du matin. Ca et la subsistent sans doute de la derniere saison des pluies des mares boueuses ou pataugent de jeunes hommes en slip armes d'une nasse ou d'un filet a bords lestes qui nous saluent en souriant. D'autres ramassent des coquillages dans les flaques des champs. Nous remarquons entre les parcelles des lignes de neons permettant au moyen d'une bache verticale et d'une bassine de recolter les insectes qui seront vendus grilles au marche.




Maisons en bois sur pilotis, cocotiers et bannieres omnipresentes du CPP
Ecolieres sur la route arrivant a Siem Riep
Peche au filet dans les flaques des rizieres.

Arrivee!

Nous parvenons durant les 6 jours a maintenir une bonne moyenne quotidienne de 120 km et notre destination apparait enfin au soir du 24 alors que des dizaines d'enfants sortent de l'ecole, envahissant la route de velos et nous criant des hellos frenetiques. Pas moyen d'apprendre  a prononcer le bonjour khmer! Qu'il s'agisse de la langue ou des devises (2), l'identite cambodgienne s'efface au profit de celle des vainqueurs.

Siem Reap est precedee d'une interminable file d'hotels de luxe qui contrastent violement avec les bicoques sur pilotis que nous croisons depuis la frontiere. Nous sommes heureux de retrouver notre collegue basque Eneko qui nous a degotte l'hotel le moins cher de la ville.

Seuls reliefs emergeant des rizieres, les palmiers se detachent nettement dans le paysage.
Dispositif de recolte des insectes.
Dans les ruines des temples d'Angkor avec notre collegue Eneko.

Angkor plus

Nous passerons trois jours a visiter les impressionnantes ruines d'Angkor, vestiges de l'immense puissance et richesse de l'empire Khmer qui domina l'Asie du Sud Est entre le IXeme et le XVeme siecle. Les elements les plus remarquables sont ces temples ornes de tours monumentales a visages tournes vers les 4 points cardinaux, ces bas reliefs d'une finesse surprenante representant des scenes de la mythologie hindoue et bien sur, cliche dramatique surgissant a la seule evocation d'Angkor, les ruines envahies par les racines des ficus ou des fromagers. Beaucoup de travaux de renovation sont en cours, ce qui laisse esperer qu' une partie des 80 euros que nous payons a l'entree ne servira pas seulement a engraisser les apparatchiks du PCC...

Un des gardiens des temples
Porte monumentale a visages, gardee par une serie d'Asuras (demons hindous).
Bas reliefs caches dans une etroite tranchee.

Les fameuses ruines devorees par les racines des fromagers
Lignes d'Asuras durant le barattage de la mer de lait (3)
Retour en Thailande et ses innombrables temples colores!

Retour en Thailande 

Nous quittons ensuite le Cambodge, et notre collegue Eneko qui fait route au sud, pour retrouver la Thailande ou la circulation reprend de plus belle, toujours a gauche. La route est monotone: une quatre voie sillonnee de pickups ou pointe de temps a autre un restaurant au milieu de nulle part. Les drapeaux de Thailande et les photos du roi decorent la quasi totalite du parcours. Nous nous arretons par hasard dans une ferme a soie qui nous propose de decouvrir tout le processus de realisation du precieux tissus, de l'elevage des vers jusqu'au tissage. Il aura fallu attendre de quitter la si mal nommee route de la soie -qu'on devrait rebaptiser route du coton- pour rencontrer les fameux (4) bombyx. Mais meme ici l'etoffe est chere et nous renoncons a remplacer nos draps de soie, pourtant bien elimes.
Cocons de bombyx (vers a soie) prets a etre recoltes.
Recuperation des filins de soie a partir des cocons ebouillantes.
Habitants du parc national de Khao Yai.

Parcs et temples

Sur la route qui mene a Bangkok, nous nous arretons au parc national de Khao Yai, a propos duquel le lonely planet ne tarit pas de superlatifs dithyrambiques. Plus ancien, plus celebre et plus beau parc de Thailande, cette reserve abrite tigres, elephants sauvages et autres grand mammiferes. Sur la route du parc qui monte raide entre les arbres, un defile continu de pickups nous depasse en vrombissant. Comment apercevoir le moindre animal dans un pareil raffut? Il semble que toute la bourgeoisie de Bangkok se soit donne rendez-vous. Nous apercevrons quelques singes qui quemandent des friandises aux voitures et de nombreuses enormes crottes qui signalent une presence reguliere d' elephants sauvages. Ces derniers resteront helas invisibles, contrairement a nos congeneres: au camping nous retrouverons les 4x4 entre lesquels s'entassent pele mele des centaines de tentes. Nous prenons conscience de la date: le premier janvier est un jour ferie ici aussi.

Mais la bienveillance des thais a raison de notre effroi. Nos voisins nous offriront de la nourriture en quantite durant ces deux jours. Puis, sur la route de Bangkok,  nous reprenons notre habitude de dormir dans des monasteres bouddhistes. Apres une demande formelle a un moine impassible assis en tailleur, l'hospitalite nous est accordee: nous logerons dans la piece aux 100 bouddhas en or. Alors que nous nous installons, un moine nous offre un sac contenant boissons au soja et soupes chinoises. Nous remercions, puis un autre nous tend un nouveau sac. La scene se reproduira six fois,  nous inventorions perplexe notre lot: 8 boissons au soja, 15 soupes chinoises, une dizaine de cafes et chocolats en poudre, 4 savons, 2 dentifrices, 3 brosses a dents, un soin pour cheveux secs, une boite de lait concentre en conserve, une de maquereaux, un bocal en verre d'ovomaltine, deux paquets de lessive... Il s'agit sans doute des offrandes de fideles dont les moines n'ont pas l'utilite. Le tout doit peser 10 kg et risque de mettre en danger notre route arriere: nous nous appliquons donc consciencieusement a absorber l'excedent en quelques festins que nous realisons a la sante du genereux monastere.

Locataires plus nombreux du parc de Khao Yai.
Un elephant est passe par ici, la bouse est encore fraiche!
Une partie du festin offert par les moines que nous tentons d'ecouler au petit dejeuner.
Same-same.
(1) Le Cambodge detient le triste record du pays le plus lourdement bombarde de l'histoire.
(2) Le dollard est utilise au meme titre que le Real.
(3) Ayant permis aux Dieux de produire le nectar d'immortalite, c'est une longue histoire que nous pourrons vous raconter a notre retour.
(4) Dans tous les sens du terme. Les vers a soie etant tues par ebouillantage dans leur cocon, ils sont ensuite consommes grilles.

2 commentaires:

  1. C'est dommage pour Khao Yai, quand j'y étais on était vraiment seuls au monde, mais bon on avait pas vu plus d'éléphants pour autant :-)

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  2. Bonne année à vous deux. Bisous!

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